par Gülçin Erdi

https://journals.openedition.org/com/13754

Cet article propose d’étudier les formes de réaction et de mobilisation citoyennes dans la ville d’Hasankeyf contre la construction d’un barrage hydroélectrique qui a entrainé la disparition de cette ville. Il s’interroge sur la nature des projets de développement en Turquie mis en place d’une manière autoritaire et qui deviennent parfois les instruments d’une politique de discrimination multidimensionnelle de la part des institutions publiques. Tout en étudiant la résistance sous contrainte au sens politique et culturel, l’article analyse les liens entre la mobilisation et l’espace en termes d’identification et d’appropriation. Il montre également comment le contexte autoritaire influence les stratégies de mobilisation en termes d’enjeux spatiaux et ethniques. Dans le cas d’Hasankeyf, l’article démontre comment les habitants ont développé des formes alternatives de résistance pour éviter un rapport de force identitaire et légitimer ainsi leur cause dans l’opinion publique en mettant en avant les risques environnementaux du projet.

Plan de l'article

  • Grands projets d’aménagement : instrument politique des gouvernements en Turquie
  • Une mobilisation révélatrice des tensions identitaires en contexte autoritaire
  • La cause environnementale comme alternative à la répression
Les aménagements urbains et environnementaux de grande ampleur constituent de plus en plus un sujet de contestation, tant au plan local, national qu’international. Dans le lancement de ces projets, les acteurs publics avancent fréquemment l’argument de l’intérêt général irréductible aux intérêts particuliers d’une poignée d’habitants. Ceci leur permet d’éviter notamment le débat public en la matière et le lancement d’un processus de concertation et de négociation avec les populations affectées. Or, cette absence de concertation et de coopération provoque souvent l’émergence d’une contestation de la part des habitants. Si ce type de résistance est souvent analysé en France dans le cadre de ce qu’on appelle les « NIMBY » (Not In My Backyard – Pas dans mon arrière-cour) pour désigner les oppositions des associations et, plus largement, du public aux installations ou aménagements susceptibles de perturber leur environnement (Trom, 1999), la dimension identitaire et spatiale de ces conte...
 
 
Gülçin Erdi, « Espace, identité et environnement dans une résistance locale. Le cas de Hasankeyf en Turquie », Les Cahiers d’Outre-Mer, 285 | 2022, 143-164.