Alors que tout au long du XXème siècle, le Moyen-Orient arabe s’est désintéressé de la Turquie, les années 2000 témoignent d’une réhabilitation de ce pays dans l’imaginaire collectif des peuples arabes. La « nouvelle » diplomatie de bon voisinage lancée par le parti de la Justice et du Développement en direction du Moyen-Orient, la projection d’un soft power turc qui se manifeste notamment par l’exportation massive de feuilletons et l’établissement d’instituts culturels Yunus Emre, ainsi que la poursuite par Ankara d’une diplomatie économique et publique, ont contribué à un « retour » de la Turquie dans la région. S’étant présenté comme champion de la cause palestinienne et ayant adopté un discours néo-tiermondiste de défense des opprimés, Recep Tayyip Erdoğan a progressivement émerge comme le nouveau Gamal Abdelnasser de la région, adulé par une large partie de l’opinion publique arabe. Or, la Turquie se trouve aussitôt victime de son propre succès : son omniprésence dans la région, la popularité de ses productions culturelles, et la compétitivité de ses exportations sur les marchés arabes éveillent la méfiance des peuples de la région. L’attraction que son « modèle » exerçait laisse progressivement la place à des suspicions quant à son « agenda caché » et ses velléités de puissance dans la région, révélant que dans la mémoire des Arabes, le souvenir de la domination ottomane reste très vif et le passé impérial « ne passe pas ».
Cette conférence analysera les vecteurs du rapprochement turco-arabe dans les années 2000 et les grands moments de la construction, puis de la déconstruction, d’une image positive de la Turquie chez l’opinion publique au Moyen-Orient. Elle examinera l’action des acteurs non-étatiques, turcs et arabes, ayant contribué à façonner la perception de la Turquie dans la région. La conférence reviendra sur les « réseaux clientélistes » de la Turquie dans le monde arabe, montrant dans quelle mesure leur existence témoigne de la profondeur et de la solidité de l’implantation d’Ankara au Moyen-Orient en dépit des difficultés que la puissance turque connait actuellement dans la région.
Jana Jabbour est docteure en sciences politiques et relations internationales, spécialiste de la Turquie. Sa thèse de doctorat, soutenue à Sciences Po Paris en 2015 et portant sur la politique étrangère de la Turquie au Moyen-Orient sous le règne de l’AKP, est publiée aux éditions du CNRS sous le titre : La Turquie, l’invention d’une diplomatie émergente, Paris, 2017, 345 pages.
Actuellement enseignante à l’Université Saint-Joseph à Beyrouth, elle a à son compte un grand nombre de publications sur le nouvel engagement d’Ankara au Moyen-Orient et l’évolution de l’image de la Turquie dans la région.
Elle a été auditionnée par divers organismes politiques au niveau européen, y compris : le Conseil de l’Europe, la Commission Européenne, le Parlement Européen, et le ministère des Affaires étrangères français. Elle est régulièrement interviewée par des agences de presse et des chaines internationales notamment : AFP, Anadolu, France 24, RFI, TRT World, CNBC.
De double-nationalité (franco- libanaise), Jana Jabbour vit entre Paris et Beyrouth. Elle maitrise cinq langues : l’arabe, le français, l’anglais, le turc et l’espagnol. Outre son diplôme de doctorat, elle est titulaire d’un double-master en « Sécurité internationale » et en « Économie Politique Internationale » de Sciences Po Paris et la London School of Economics, ainsi que d’une licence en science politique de Sciences Po Paris.
Date de l'événement | 15/03/2019 6:00 pm |
Date de fin | 15/03/2019 8:00 pm |
Places | 60 |
Inscrit.e.s | 60 |
Places disponibles | 0 |
Date limite d'inscription | 15/03/2019 11:55 am |
Lieu | IFEA |