En 1920, les Russes fuyant la Révolution bolchévique et l’Armée Wrangel atteignent les rives du Bosphore : après une période de quarantaine, 200 000 Russes s’installent en ville, à Galata, à Pera, Kadiköy et sur les Iles des Princes. Pendant les deux ou trois de leur séjour (avant de repartir à Paris, Nice ou Berlin), ils marquent le paysage et la structure sociale de la ville. Si le jazz, le cinéma, les bals à l’européenne conquièrent Istanbul, on voit également le vice s’installer : la prostitution redouble, les cafés et les bars tenus par les Russes se multiplient, de nouvelles drogues (cocaïne et éroïne) envahissent les quartiers déjà douteux... Le roman emblématique de Yakup Kadri Karaosmanoglu résume la nouvelle perception d’Istanbul : Sodome et Gomorrhe. La ville connaît – malgré des conditions difficiles – une immense activité journalistique, sociale et culturelle marquée par une liberté que permet cette atmosphère de guerre et de fin du monde. Quand, en septembre 1923, à la suite du traité de Lausanne (signé en juillet), les dernières troupes alliées quittent Istanbul et alors qu’en Anatolie, les Kémalistes de la Guerre de Libération (Istiklâl Harbi) qui a fait rage contre les Grecs, réussissent à regagner le territoire de la nation actuelle, la ville d’Istanbul est exsangue : en 1918, les Unionistes avaient quitté le navire et se cachaient à Rome, Berlin ou Tiflis, le sultan se montrait incapable de reprendre la direction de l’Etat et les proches et collaborateurs de l’ancien régime, en particulier le gouvernement de Damat Ferid Pacha (4 mars-10 septembre 1919) qui laisse d’amers souvenirs, commençait à trembler : quel sera le destin de leur ville, stigmatisée par les révolutionnaires d’Anatolie ?
C’est dans ce cadre déroutant, chaotique, cosmopolite qu’une vie sociale et culturelle très riche et proprement révolutionnaire dans de nombreuses sphères, va se mettre en place : la place très particulière d’Istanbul dans l’émergence d’une modernité périphérique amenée à se diffuser dans la Turquie républicaine mais aussi dans les pays voisins comme à Paris ou Berlin (à travers le cas de la communauté russe), permet aussi de questionner la notion de capitale littéraire et de nationalisme en littérature
Date de l'événement | 14/11/2019 10:00 am |
Date de fin | 15/11/2019 2:30 pm |
Places | 60 |
Inscrit.e.s | 42 |
Places disponibles | 18 |
Date limite d'inscription | 13/11/2019 11:55 am |
Lieu | IFEA |
Jeudi 14 novembre 10:00 - 13:30 |
10h15 Présentation de la rencontre (Istanbul occupée: la danse sur le volcan II) Frédéric HITZEL, CETOBaC-EHESS Timour MUHIDINE, Inalco-CERMOM 10h30 Président de séance : Bayram Balcı (IFEA)
Claire LE BRAS (IFEA) « Istanbul vue par ses occupants : experts et expertise au sein des commissions interalliées »
François GEORGEON (CETOBaC-EHESS) « Une page d'histoire économique et sociale d'Istanbul à l'époque de l'armistice : tavernes et autres mauvais lieux »
Gülsün GÜVENLI (Université de Galatasaray, Istanbul) « La caricature, reflet d'une société en mutation sous l’occupation »
12h00: Pause-café 12h30 : Président de séance : T. Muhidine Izzeddin ÇALIŞLAR (Université Bilgi, Istanbul) « Les journaux des officiers Eyüp (Durukan) et İzzettin (Çalışlar) »
Johann STRAUSS (Université de Strasbourg) « Reprise, renaissance, innovation – les activités littéraires des minorités à Istanbul, 1918-1923 »
13h30: Déjeuner |
Jeudi 14 novembre 15:00 - 17:30 |
Rencontre artistique russo-turque dans Istanbul occupée. Présidents de séance : Alexis Wick, Frédéric Hitzel (CETOBaC-EHESS)Saadet ÖZEN (Historienne et documentaliste, Istanbul) « Les rapports de force et la caméra: Représentation de l’occupation dans les archives cinématographiques »
Didier SAPAUT (Chercheur indépendant, documentaliste) « Présentation d’archives cinématographiques sur le Front d'Orient et Istanbul occupée »
17:00: Pause-café 17:30: Projection du film « Les oubliés de la victoire-l’odyssée des soldats d’Orient » |
Vendredi 15 novembre 10:00 - 14:30 |
Presse et littérature, culture. Pdt de séance : François GeorgeonLoïc MARCOU (Inalco, CREE) « L’occupation d'Istanbul dans le journal satirique rum Embros [Εμπρός] (1908-1920) »
Seza SINANLAR-USLU (Université technique de Yıldız, Istanbul) « Interrogations sur les archéologues du corps d’occupation français d’Istanbul »
Timour MUHIDINE (Inalco, CERMOM) « Sabiha et Zekeriya Sertel en 1919 : résistance passive à Istanbul »
Daniel-Joseph MACARTHUR-SEAL, (British Institute, Ankara) « ‘It is not art and it is not the East’: popular entertainment in occupied Istanbul »
12:30 - 14:30 Pause buffet |