Galata joue Kolektif ?
Le concert de Kolektif İstanbul du mardi 15 juin sur la place de Galata semblait placé sous la bannière du cosmopolitisme, pour le lieu comme pour la musique. Nous arrivons donc vers 20h au pied de la tour, où une scène et un parterre de chaises ont été installés.
Si le quartier fut fondé par les Génois et peuplé dès lors par des non-musulmans dont le commerce florissant a laissé un riche héritage architectural, il a été après leur départ dans les années 50 investi par les populations anatoliennes issue de l’exode rural, entraînant une certaine dévaluation. Cependant des artistes et des gens de lettres, arrivés dans les années 90 et sensibles aux attributs historiques et architecturaux de Galata, ont participé à sa remise au goût du jour, en dotant le quartier d’un rayonnement culturel majeur au sein de la métropole.
Cette orientation est relayée par la municipalité de Beyoğlu, dont la place de Galata se fait la tribune. Elle a été l’objet de réaménagements récents, elle est aujourd’hui majoritairement piétonne, cernée par des commerces, bars et restaurants appréciés tant par les touristes que par les classes aisées installées dans le quartier. Bien que le concert de ce soir soit intégré dans la programmation d’İstanbul 2010, l’événement est une initiative de la municipalité, comme en témoignent les guirlandes qui habillent la place, ainsi que l’écran installé en fond de scène. Celui-ci diffuse en boucle un programme vantant les actions sociales entreprises par la mairie ; néanmoins la population aperçue dans la vidéo ressemble peu à celle qui vient assister au concert.
Le groupe de ce soir, Kolektif İstanbul, affiche lui aussi des ambitions cosmopolites. Formé autour du saxophoniste français Richard Laniepce, installé à İstanbul depuis une quinzaine d’années, accompagné de musiciens turcs souvent multi-instrumentistes, il est habitué tant aux salles de spectable de Beyoğlu qu’aux tournées européennes, essentiellement françaises.
Son répertoire s’est constitué au contact de musiciens de villages coutumiers des musiques de fêtes, et mêle les airs traditionnels balkaniques et anatoliens dans un coktail emprunt de jazz, répertoire concocté dans son repère des îles aux Princes. Le groupe laisse cependant une large place à l’improvisation et garde une grande liberté d’orchestration, à l’image des instruments qui cohabitent, clarinette, saxophone, accordéon, ou encore la cornemuse de Richard qui ouvre le concert en y conviant ses origines bretonnes.
Le concert débute doucement. Les musiciens font une pause au bout de quelques dizaines de minutes pour ne pas entraver l’appel à la prière. Le public, relativement varié, parmi lequel nous croisons un certain nombre d’étudiants Erasmus, se densifie ensuite au cours de la performance, et investit progressivement toute la place ainsi que les vieux murs. Le mélange musical semble prendre et gagner en intensité, comme en témoigne le nombre croissant de danseurs qui se regroupent devant la scène.
L’événement semble en fin de compte avoir eu un certain succès… mais pas forcément auprès de tous les habitants de Galata qu’il était susceptible de rassembler.